03 décembre 2011

ESCAPADE EN ITALIE

Chronique de Sema, globetrotteuse
Dans deux jours, Rome. Je vais pouvoir confronter tous les clichés que j’en ai à la réalité. Comme à chaque fois que je m’apprête à découvrir une ville que je ne connais pas, celle-ci m’apparaît comme un magma nébuleux, une pieuvre aux formes imprécises.

Mais il ne me faut pas longtemps pour me laisser apprivoiser par ce lieu qui n’est capitale de l’Italie que depuis 1871. Peut-être est-ce parce que celle-ci, bien que de taille imposante, reste encore humaine avec ses quelque deux millions sept cent mille habitants. En tout cas, j’y suis à peine depuis trois heures que je m’y sens bien. Et cette impression de plénitude m’envahit dès le deuxième site que je visite après le Colisée.

Pour fuir les touristes, laissez vos pas vous mener jusqu’en haut du Palatin, une des sept collines de Rome et profitez de la séculaire quiétude qui y règne. Les bruits de la ville y sont atténués. On déambule entre les vielles pierres, une petite brise se lève, soulevant la poussière, faisant voleter quelques feuilles dans la lumière dorée d’un automne encore tiède. Des fleurs jaunes, dont j’ignore le nom, balancent légèrement la tête. ça et là, des papillons. Et cette odeur de pins cyprès. Je descends et longe la Voie Sacrée, mettant mes pas dans d’autres, plus anciens. Ce qui frappe dans Rome, c’est la patine de l’âge.

Puis je rejoins la blancheur baroque du Capitole. Petite pause dans un café en terrasse. Siroter une bière et manger un sandwich club (ils sont impressionnants !) Piazza Venezia. La bière m’assomme, le prix de ma consommation aussi. Mais cela fait partie du trip, de l’aventure. Je monte vers le Capitole, entre dans la fraîcheur de la Basilique, m’assieds sur un banc et ôte mes baskets. Petite sieste de quelques minutes qui me requinque et me permet de reprendre ma déambulation à travers la ville.Zut !

Oublié de recharger la batterie de mon appareil. Les visites de l’après-midi ne seront pas immortalisées. Et c’est bien dommage ! Car je découvre le Panthéon, la Fontaine de Trevi, la Piazza di Spagna avec sa fontaine en forme de bateau. Moi aussi je jette mes deux piécettes dans la Fontaine de Trevi, l’une pour faire un vœu personnel, l’autre pour espérer revenir un jour à Rome. Ce qui ne serait pas pour me déplaire car je suis tombée sous le charme de cette ville, c’est indéniable. Je me dis que ce doit être ça, la dolce vita, la douceur de vivre à l’italienne.

Des thermes de Caracalla, inaugurés en 216 ap. JC, à la Bouche de la Vérité, j’arpente Rome ; j’en prends la pleine mesure. Les ponts jetés par-dessus le Tibre sont, comme tout ce que j’ai vu pour le moment, marqués par le temps. J’emprunte le Ponte Palatino. Mes jambes ne me portent plus. Je m’affale en terrasse Piazza di Marria in Trastevere. Chocolat chaud si épais qu’il se mange à la cuillère, fatigue, mais quel bonheur.

Décidément, je pourrais m’installer et vivre dans cette ville !Retour de l’autre côté du Tibre à la découverte de l’ancien ghetto juif dans lequel, suite à une Bulle papale, les Juifs de la ville furent confinés pendant plus de trois siècles, contraints de porter sur leurs vêtements un cercle jaune, précurseur d’un autre signe stigmatisant autrement plus sinistre. Messieurs, vous mettrez la kippa pour entrer dans la synagogue, construite entre 1901 et 1904. Le contrôle de sécurité est obligatoire depuis qu’un attentat a été perpétré par l’OLP en 1982. Là, notre guide nous explique qu’en 1943, Rome a subi l’occupation allemande pendant neuf mois et que les Nazis ont pillé les bibliothèques, s’emparant de manuscrits et de livres précieux qui n’ont jamais été retrouvés.

Retour au pas de course à la Fontaine de Trevi pour faire quelques clichés. Il ne sera pas dit que je quitterai Rome sans une photo de l’imposant Neptune !

Dîner dans une Piazza Barberini. Les raviolis sauce aux morilles sont onctueux et fondent sous la dent. Attention à votre porte-monnaie également susceptible de fondre car les prix indiqués sur la carte ne prennent pas en compte les couverts, le pain ni le service que l’on vous facturera en supplément. Vous risquez de faire une drôle de tête si vous ne vous y attendez pas.

De retour à mon hôtel non loin de la gare Termini, je m’effondre sur mon lit. Mes pieds sont des excroissances douloureuses, des centres d’où irradie la souffrance. En dépit de cette paroxystique algie, je ne regrette pas ma longue expédition à travers la capitale du Latium. J’ai pris des rues, des venelles, le pouls de la ville que je sens dans tout mon corps endolori.

Je m’endors, fébrile à l’idée que demain, je découvrirai le saint des saints : le Vatican.

Jour 3

Métro ligne A, descendre à Ottaviano San Petro. Rdv avec notre guide qui nous emmène pour trois heures d’histoire, d’art et de culture. C’est Mussolini qui, en 1929, a accordé au Pape l’extraterritorialité du Vatican.

Epoustouflée, je découvre sur ma gauche une longue galerie où s’aligne, sur la gauche et la droite, une succession de statues, de bustes et de sarcophages. Au détour d’une cour, un Apollon, son prêtre au visage si expressif malgré sa frigidité marmoréenne, un peu plus loin, des bassins en marbre d’Egypte et aux pieds griffus. C’est une profusion d’œuvres : serpents de mer, fenêtres aux bordures décorées dans le style grotesque à découvrir dans la galerie des cartes, volets au bois travaillé dans les chambres de Raphaël, plafonds en bois couverts de feuilles d’or, salles aux œuvres plus contemporaines où je reconnais des figures grimaçantes de Francis Bacon. Et puis le nec plus ultra, l’incontournable Chapelle Sixtine. Noire de monde.

D’un monde que j’aimerais voir s’écarter et même disparaître pour pouvoir m’allonger à terre et détailler la voûte surchargée, œuvre du grand maître qu’était Michel-Ange : la Création de l’Homme, Adam et Eve chassés du Paradis. Sur le mur en face : le Jugement Dernier. No flash, no photo, no bruit. Des gardes s’épuisent en inutiles « chut » pour nous rappeler qu’ici nous sommes dans un lieu saint qui impose le recueillement.

Puis nous terminons par la Basilique Saint-Pierre, réputée être la plus grande au monde. Comme tous les touristes présents, j’admire sur la droite La Piéta de Michel-Ange et un peu plus loin des œuvres du Bernin.

Nous ressortons sur la place Saint-Pierre, direction Château-d’Ange puis la Galerie Borghèse située en hauteur. Comment raconter l’inracontable ? Quels mots trouver pour décrire la perfection des statues que, pas après pas, j’y découvre ? La Pauline de Canova, le Rapt de Proserpine du Bernin, pour ne citer que celles-ci.

Pause cannelloni siciliano, pâtisserie garnie de ricotta. Un vrai délice !

Je repars à l’hôtel, fais ma valise. Demain il me faudra me lever tôt pour aller prendre l’avion à l’aéroport de Fiumicino. Ainsi s’achève cette parenthèse à Rome, courte escapade dont je reviens impressionnée. Oui, j’ai confronté les clichés à la réalité. Et s’il y a une chose que j’ai découverte, c’est que cette ville mérite le détour !

Par Sema, globetrotteuse, 24-28 octobre 2011
Sema est professeur d'anglais et écrivain. Son dernier livre, le Chant des tourterelles, édition Arganier, est un des premiers romans écrit autour du chemin de l'immigration turque vers la France.

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